"AU FINAL" : on n'en a pas fini!

Faire sens, faire problème, poser problème, poser polémique (sic, tel que  je l'ai entendu hier au JT d'une chaîne française), la liste est longue des "estompements de la norme"... Et grande la tentation de renoncer, face aux assauts de la (post)modernité, aux règles du bon usage: "sans faute", vous l'écririez avec ou sans S ?, demandai-je naguère, jeune journaliste malicieux, à Maurice Grevisse en personne.
Bien embarrassé de trancher, tout pape de la grammaire qu'il était, entre une dictée 'sans faute' (zéro faute) et une dictée 'sans fautes' (c.-à-d. sans fautes multiples émaillant la copie, ce qui est usuellement le cas)...

Pour ma part, j'ai entrepris, voilà bientôt deux ans et avec l'aide de l'un ou l'autre complice (conforté par une sentence sans équivoque de l'Académie), un combat que je ne qualifierai pas d'arrière-garde mais plutôt d'escarmouche contre... AU FINAL.
Agaçante, exaspérante, pullulante expression qui, quoique fautive et absurde, a envahi sans raison notre jargon médiatique - elle semble apparaître dans les archives du Monde dès 1987 - pour finir par polluer notre conversation quotidienne à tous les coins de phrase. Tendez l'oreille, dans le métro, dans la rue, dans votre salon: c'est consternant.

Dans l'article ou plutôt l'appel ci-joint, publié sur mon blog personnel en février 2013, j'avais même prédit qu'à ce rythme, on verrait bientôt apparaître par assonance "au global", voire "au local". Ce qui n'a pas traîné: le premier m'a écorché les oreilles voilà deux mois à peine, de nouveau lors d'un journal télévisé d'une grande chaîne française (La 2).

Bref, voilà encore une guérilla linguistique à mener, pour laquelle un petit coup de main ne serait pas de refus... Avant qu'il soit trop tard. Souvenez-vous de ces résistants, les "hommes-livres", dans Fahrenheit 451, film dans lequel Truffaut dépeint une société dystopique où écrire est interdit. Certains parmi nous devront-ils devenir des "hommes-grammaires" pour que notre belle langue française ne meure pas frappée de stupidité? (JD051014)

P.S. Ce texte est, in extenso, celui d'un courriel adressé au journaliste-blogger (ou blogueur) Yann Guéguan après la lecture d'un excellent article intitulé "7 fautes de français qui n'en sont pas, en fait", publié le 11 septembre 2014 "Dans mon labo", un blog où il relate ses expériences journalistiques et évoque les débats qui agitent les rédactions, notamment autour de l'écriture, à l'ère dite numérique…
Merci à Yann qui m'a gentiment renvoyé l'ascenseur! 



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Contre l'aufinalisme ambiant, voici le texte de l'appel aux rédactions Pour en finir avec "au final".

A LIRE AUSSI, un excellent article de Didier POURQUERY dans Le Monde (2014), sous un titre similaire... et définitif : Pour en finir avec l'expression "Au final"!