Maître Jean Bosquet vu par ©JackyDegueldre2011 |
BOSQUET.2015
– “L'Escolle des povres”
Projet de spectacle culturel scénique et multimédia
pour Mons 2015 ©JackyDegueldre2011
Projet de spectacle culturel scénique et multimédia
pour Mons 2015 ©JackyDegueldre2011
● Développement
d'une scène-type (motion
capture)
dans la scénographie multimédia
Circa 1580 | Querelle JB vs le « roi des Ribauds » au sujet des enfants pauvres (fiction) |
N.B.
A titre didactique dans une scène au moins, la langue des dialogues
serait, soit écrite en françois ancien et sous-titrée en français
moderne, soit plutôt perceptible directement comme du français
d'aujourd'hui mâtiné de tournures compréhensibles et mots
marquants du françois d'autrefois, parfois très proche encore du
wallon et du picard actuels. Le tout tiré, autant que possible, de
la grammaire de Bosquet, émaillée de nombreux exemples et
citations. De même que les faits relatés ci-dessous sont inspirés
de détails authentiques des annales montoises (Devillers,
Léopold,
Annales du Cercle Archéologique de Mons, Mons,
1857, tome 1, pp.317-318, Bibliothèque UMons).
LE PACTE DES MAISTRES
BOSQUET ET PINTARD (4')
Le
soir venu sur Mons, Maître Bosquet arpente la rue des Fillettes,
« desoubz le Mont du Parcq ».
Dans la pénombre il manque se heurter à un homme de forte stature et d'allure bourrue, à la mise négligée...
Dans la pénombre il manque se heurter à un homme de forte stature et d'allure bourrue, à la mise négligée...
L'homme,
quelque peu aviné au sortir d'une taverne, s'emporte en gesticulant:
-
Hola ! Peste soit que n'ay-ie veu cestuy-cy le hardy! Mais c'est le
petit maistre Bosquet, de la maudite escolle des povres, et bien
embusqué que me semble ! Quelle est ceste audace de venir
nuictamment se perdre rue des Fillettes, en nostre royaulme des
ribauds et coquines? Aurois-tu quelques liarts, florins, patards ou
autre joyeuse monnoye? Que tu me donnerois pour gaignage et payer
céans ton paissage sur mes povres artoilles, cy-dedans mes chausses?
Maître
Bosquet, du tac au tac, déclamant son distique préféré:-
« Le sage, et remply de sçavoir / Porte avec luy, tout son
avoir »... ha ha ha, de moi vous ne tirerez pas mesme un
ernestus liegeois, tout roy des tire-maille et des ribaudes que
soyez, Maistre Pintard!
- C'est qu'il me counnoit bien, le poëte, mais adoncques croit-il qu'il ne me peut mettre en terrible courroux?!
- « Où loge l'yurongnerie, là, domine la fureur: où est fureur, illec ne reside Sapience. »
La sagesse!, Maître Paillard, où est votre grand' sagesse? « Tu briseras plus-tost, que ne corrigeras, ce quy est en malice endurcy »! ... Je vous cognois assez, roy des pintards, pour vous dire que « Quand l'homme entre en cholere extreme,/Il sorte aussy tost de soy-même ».
...Oyez bien, vous quy estes et auez esté longuement le vénéré magistrat souverain des bougres au beau mitan de ceste Cour des miracles: ici mesme, dessous le Mont du Parcq, décéda sans génération, en octobre voicy cent et cinquante années, d'un penchant de boisson et de noire cholère, cestuy-là quy estoit lors le roi des ribauds, guêux et brigandes de la ville de Mons, un bourreau nommé Jehan Pasquier. Il fut payé douze sols tournois à quatre hommes pour leur salaire, dudit Jehan Pasquier avoir porté en terre et de nuit, pour tant que point ne fut mis en terre sainte...
Si m'en croyez, Maître Pintard, sachez raison garder et prison éviter. Mais pleut à Dieu qu'à l'heure sonnée vous allassiez à lui plus-tost qu'à diable, tele Jehan le mécréant bourrel, lequel faisoit icy pour son odiëux commerce œuvrer de sottes et pauvres fillettes. Puni de cruelle mort il fut. Et du cimetière cayau fut banni, comme moy-mesme je l'estois de Mons naguère par mon roy pour n'avoir sceu me taire!
- Taisez-vos doncques, damné écolâtre, car vous m'allez fascher!
- Non, vous, escoutez-moi sagement quand je vous explane d'excellentes raisons de ne point japper.
« Plus la vertu l'on violente / Par playe ou par trenchant parler / Plus son tige et croît et s'augmente/ Et sa fleur on voit rutiller ».
...En ceste escolle des crottes que tu voudrois mesdire, mon garson, vont de pauvres enfans comme tu le fus, pour s'instruire. Quy desirent sçavoir l'art de bien prononcer, et lire, et de correctement escrire. Ce que toi-mesme ne sçays point, gros maling!
Quy sçait?, sans mocquerie, s'il advenoit que tu vinsses humblement pour apprendre à l'escolle de la Grande-Aumône, sans empester d'haleine ni souillard ressembler, je te pourrois parfois prendre en disciple et quelcunes leçons secrètement donner... Mais, prudence!, si tu ne respectes nostre pacte en silence, que tu faisois le jacques ou qu'à chastes aureilles advinst ta présence: comme tu n'es point le pourceau de Saint Antoine qui va librement dans nos logis pour y cercher pitance, nostre bonne dame patronnesse la Doyenne des chanoinesses de Sainte Waudru pourroit bien te botter le cul!
Lors, ma foy, Maistre Pintard, si tu es bel et bien le roy des ribauds et des pauvres, plus-tost que mon chemin leur empescher par force, sois doncques un bon et prudent roy : ces pauvres enfans, en mon estude lez envoye !
- C'est qu'il me counnoit bien, le poëte, mais adoncques croit-il qu'il ne me peut mettre en terrible courroux?!
- « Où loge l'yurongnerie, là, domine la fureur: où est fureur, illec ne reside Sapience. »
La sagesse!, Maître Paillard, où est votre grand' sagesse? « Tu briseras plus-tost, que ne corrigeras, ce quy est en malice endurcy »! ... Je vous cognois assez, roy des pintards, pour vous dire que « Quand l'homme entre en cholere extreme,/Il sorte aussy tost de soy-même ».
...Oyez bien, vous quy estes et auez esté longuement le vénéré magistrat souverain des bougres au beau mitan de ceste Cour des miracles: ici mesme, dessous le Mont du Parcq, décéda sans génération, en octobre voicy cent et cinquante années, d'un penchant de boisson et de noire cholère, cestuy-là quy estoit lors le roi des ribauds, guêux et brigandes de la ville de Mons, un bourreau nommé Jehan Pasquier. Il fut payé douze sols tournois à quatre hommes pour leur salaire, dudit Jehan Pasquier avoir porté en terre et de nuit, pour tant que point ne fut mis en terre sainte...
Si m'en croyez, Maître Pintard, sachez raison garder et prison éviter. Mais pleut à Dieu qu'à l'heure sonnée vous allassiez à lui plus-tost qu'à diable, tele Jehan le mécréant bourrel, lequel faisoit icy pour son odiëux commerce œuvrer de sottes et pauvres fillettes. Puni de cruelle mort il fut. Et du cimetière cayau fut banni, comme moy-mesme je l'estois de Mons naguère par mon roy pour n'avoir sceu me taire!
- Taisez-vos doncques, damné écolâtre, car vous m'allez fascher!
- Non, vous, escoutez-moi sagement quand je vous explane d'excellentes raisons de ne point japper.
« Plus la vertu l'on violente / Par playe ou par trenchant parler / Plus son tige et croît et s'augmente/ Et sa fleur on voit rutiller ».
...En ceste escolle des crottes que tu voudrois mesdire, mon garson, vont de pauvres enfans comme tu le fus, pour s'instruire. Quy desirent sçavoir l'art de bien prononcer, et lire, et de correctement escrire. Ce que toi-mesme ne sçays point, gros maling!
Quy sçait?, sans mocquerie, s'il advenoit que tu vinsses humblement pour apprendre à l'escolle de la Grande-Aumône, sans empester d'haleine ni souillard ressembler, je te pourrois parfois prendre en disciple et quelcunes leçons secrètement donner... Mais, prudence!, si tu ne respectes nostre pacte en silence, que tu faisois le jacques ou qu'à chastes aureilles advinst ta présence: comme tu n'es point le pourceau de Saint Antoine qui va librement dans nos logis pour y cercher pitance, nostre bonne dame patronnesse la Doyenne des chanoinesses de Sainte Waudru pourroit bien te botter le cul!
Lors, ma foy, Maistre Pintard, si tu es bel et bien le roy des ribauds et des pauvres, plus-tost que mon chemin leur empescher par force, sois doncques un bon et prudent roy : ces pauvres enfans, en mon estude lez envoye !
...
Et Maître Bosquet triomphalement s'en retourne à l'école des
pauvres, laissant le gros nigaud tout pantois.