autempsdesformules@jackydegueldre2010
« Le temps réel est un temps mondial.(...) C'est un événement sans pareil »
« La vitesse est à la fois une menace (...) et, en même temps, elle est la vie même.
On ne peut pas séparer la vitesse de la richesse. (...) On peut dire qu'elle n'est pas un phénomène, mais la relation entre les phénomènes. Autrement dit, la relativité même.
On peut même aller plus loin et dire que la vitesse est un milieu. Elle n'est pas simplement un problème de temps entre deux points, elle est un milieu qui est provoqué par le véhicule. »
Paul Virilio, in Carnet de notes, JD, 1998.
Dimanche, jour de la Formule 1 télévisée. Pas eu le temps de regarder les images fugitives du Grand Prix, d'ailleurs sans véritable intérêt pour moi depuis très longtemps. Juste eu le temps de retrouver, dans mes carnets, cette réflexion sur le temps et la vitesse...
A quelle vitesse s'éloigne le temps?
Soudain la question m'est apparue évidente. Le temps qui passe a une vitesse, mais elle n'est pas celle de l'aiguille qui tourne inexorablement, constante. Le temps passe mais, ne le dit-on pas bien souvent, plus ou moins vite. Les heures, les minutes du bonheur sont trop courtes, comme si le temps accélérait quand le coeur bat plus vite, les moments difficiles semblent, eux, tellement longs. Et longues sont les heures qui nous font oublier nos malheurs. (...) Mais voilà que je me surprends à devoir compter pour me dire que mon père n'est pas mort il y a trois ans mais bien six ans. Certaines secondes ont été très très longues, comme celles où il m'a regardé dans les yeux avant de mourir.
Certaines heures, par contre, ont dû me sembler des secondes, depuis lors. Des instants intenses sans doute, mais trop brefs, où la vie semblait à nouveau me sourire, lumineuse comme, par exemple, ma rencontre avec Elle, si loin déjà. A quelle vitesse s'éloigne le bonheur?
Le temps ne file pas semblablement pour tout le monde. Les heures de mes nuits sont longues, mais que dire des heures de celui qui souffre dans sa nuit d'hôpital, ou des heures de sommeil de ces sans-papiers qui ont entamé depuis plusieurs jours une grève de la faim pour revendiquer le droit à une vie digne. Le temps ne passait-il pourtant pas plus vite pour eux, là-bas sous les latitudes équatoriales? Même fuseau horaire, mais ils bouclaient 40.000 kilomètres en 24 heures à Bamako ou Kigali, ici ils n'en font plus que 20 ou 25.000, tout est donc ralenti. En un jour, un seul, ils sont partis pour l'eldorado, maintenant cela fait cinq ou six ans qu'ils attendent. A quelle vitesse s'éloigne le malheur? Jamais assez vite! Décidément, le temps qui passe est relatif.
JD, mars 2006.