Avant-propos...

Avant-propos...

L’Europe se cherche. Meurtrie presque à mort par deux effroyables guerres, menacée d’asphyxie par l’oppression totalitaire aux noms changeants, elle essaye péniblement de prendre conscience de sa réalité. Morcelée par cent barrières politiques, linguistiques, religieuses, elle éprouve le besoin de réaliser l’unité sans laquelle, elle le sent bien, elle est condamnée à abdiquer son rôle de foyer de rayonnement universel. Des mouvements se créent, tentant les uns après les autres de susciter, dans les masses populaires ou dans les milieux officiels, un élan qui prendrait par exemple la forme d'une fédération européenne. Congrès européens, manifestes pour l'Europe, journaux prêchant l'Europe, drapeau européen: tout cela prouve un désir de remédier à l'asthénie où son compartimentage a amené notre continent. 
L'Europe se cherche et s'interroge. Ses intellectuels et ses doctrinaires voudraient savoir si l'Europe est plus qu'un nom d'atlas, si la coexistence géographique de tant de peuples et de groupes minoritaires dans ce qu'on appelle souvent cette péninsule de l'Asie suffit à justifier une vie commune; s'il existe un dénominateur commun qui les réunisse, lien ténu peut-être, mais réel.
Ce texte, d’une étonnante actualité, n’était la référence au concept désormais controversé et désuet de ‘race’ dont il amène le propos scientifique, a soixante ans.
Ce sont, telles quelles, les vingt premières lignes de l'avant-propos donné à son ouvrage Les races de l'Europe (Paris, Payot, 1952), par le Suisse Marc-Rodolphe Sauter, mort en 1983, professeur d'anthropologie et de paléontologie humaine à l'Université de Genève, dont il dirigea longtemps le département d'anthropologie, aujourd'hui dissous. (JD2013)